Évaluer les fournisseurs de services technologiques en temps de pandémie

Gascon Avocats

Depuis quelques années, plusieurs organisations ont implanté des outils technologiques internes et développé des plateformes électroniques leur permettant de poursuivre leurs activités via le télétravail. L’arrivée de la pandémie de COVID-19 a accéléré ce processus d’implantation pour plusieurs organisations, lesquelles se tournent maintenant vers les fournisseurs de services technologiques pour assurer, entre autres, le maintien de leurs activités et les services de nuage.

Bien que les outils technologiques soient essentiels pour une organisation, surtout en période de télétravail soutenu, il est important de procéder à une analyse approfondie de certains éléments avant de conclure un contrat de service. Cet article vous détaillera les 6 éléments à considérer dans l’analyse.

1. Niveaux de service

Les contrats de fournisseurs de service contiennent tous une section relative à l’accord du niveau de service communément appelé un « Service Level Agreement » (SLA). Cet accord définit les seuils de services et la disponibilité que le fournisseur s’engage à respecter pour la durée du contrat. Le fournisseur y décrit également la capacité de son réseau et les modalités relatives à son entretien. Il peut également contenir des restrictions imposées au client, comme les heures de services du fournisseur ou les limites d’utilisation visant à assurer le bon fonctionnement du réseau.

La pratique courante dans l’industrie consiste à offrir au client un crédit de services, si le fournisseur ne respecte pas les seuils décrits au SLA. Il incombe toutefois au client d’en faire la demande.

Il est essentiel que le client valide que les éléments suivants sont traités au contrat :

  • l’accord du niveau de service
  • l’engagement du fournisseur quant au temps moyen nécessaire pour identifier un problème de service ou une panne sur leur réseau (aussi connu sous l’anglicisme Mean time to respond “MTTr”)
  • l’engagement du fournisseur quant au temps moyen de réparation de tout problème sur son réseau et du rétablissement des fonctions (aussi connu sous l’anglicisme Mean time to repair “MTTR”)
  • l’étendue, le moment et la durée des périodes d’entretien et les modalités d’avis préalable au client
  • la valeur des crédits qui pourront être offerts au client en cas de défaut du fournisseur, leurs limites (quant à la valeur d’un crédit ou au nombre de crédits dont le client peut se prévaloir) et le moyen pour le client de les obtenir
  • la possibilité pour le client de résilier le contrat sans pénalité, en cas de défaut récurrent du fournisseur.

2. Droit de résiliation

Les contrats de fourniture de services technologiques limitent habituellement les droits de résiliation des clients et peuvent également prévoir des renouvellements automatiques.

Le client devrait donc se pencher sur ces questions dès le début du processus de vérification diligente afin de valider :

  • s’il peut mettre fin au contrat en cas de défaut du fournisseur de services
  • s’il conserve des recours contre le fournisseur en cas de résiliation
  • s’il a à encourir des frais advenant qu’il souhaite résilier le contrat avant terme et que le fournisseur n’est pas en défaut
  • s’il peut empêcher le renouvellement automatique
  • si le fournisseur de services a la possibilité de résilier le contrat en cas de défaut du client, et, dans l’affirmative, quel avis préalable doit-il transmettre au client ?

Une clause de résiliation avant terme implique également la nécessité d’examiner les conséquences de cette résiliation. Si le maintien des activités commerciales du client dépend de la fourniture des services technologiques, ce dernier doit s’assurer de la réponse aux questions élémentaires suivantes :

  • Est-ce que les activités commerciales du client exigent que le fournisseur de services s’engage à maintenir le service (même en cas de défaut ou de résiliation) jusqu’au transfert du service vers un nouveau fournisseur?
  • Est-ce que le client requiert une licence ou un accès à un code source pour poursuivre ses activités?
  • Est-ce que le client subit une perte ou engage des frais importants pour transférer le service vers un autre fournisseur ?

3. Définition contractuelle de la force majeure

Normalement, le contrat de service contient une clause relative à la non-responsabilité du fournisseur de services dans un cas de force majeure. Le client est invité à analyser attentivement les événements qui seront contractuellement considérés comme étant des événements de force majeure pour établir cette absence de responsabilité. Nous pensons, notamment, à la faute d’un sous-traitant, au sabotage sur le réseau, aux délais de livraison de matériaux ou encore à des événements tels que la grève ou le lock-out. À la base, un événement de force majeure doit être de nature inévitable et hors du contrôle du fournisseur de services.

Dans toute éventualité, le client devra s’attarder aux garanties qui lui sont offertes par le fournisseur de services en cas de force majeure et aux moyens qui sont mis en place pour pallier toute interruption de service.

Lorsqu’un contrat de service est signé en période de pandémie, le fournisseur s’engage à offrir ses services dans un contexte bien précis et il ne pourra donc, par la suite, y référer comme étant un cas de force majeure.

4. Propriétaire du réseau ou revendeur de services

Avant de conclure un contrat de service, le client est invité à confirmer le rôle de son fournisseur. Ce dernier est-il propriétaire du réseau ou revendeur de services ? Lorsqu’en présence d’une relation client/revendeur, certaines considérations additionnelles d’importance doivent être abordées.

En premier lieu, dans une telle relation client/revendeur, le client se retrouvera généralement dans une relation tripartite où il n’aura aucun contrôle sur la relation contractuelle entre le revendeur et le fournisseur original. De ce fait, il pourra devenir victime de cette relation si le revendeur est en défaut face au fournisseur original ou devient insolvable.

En outre, la capacité de négociation du client avec un revendeur est parfois plus limitée. Le revendeur risque d’offrir systématiquement les modalités qui lui sont accordées par le fournisseur original et il deviendra donc plus difficile pour le client de négocier des accords de services plus importants, des périodes d’entretien plus définies ou des crédits plus élevés.

Le client doit également s’assurer qui est responsable du soutien technique : le revendeur ou le fournisseur original ? De plus, le revendeur doit conserver une responsabilité contractuelle quant aux services offerts, sans possibilité de rejeter la faute sur le fournisseur original avec qui le client n’entretient aucun lien contractuel.

Enfin, la présence d’un revendeur est également un élément à considérer lors de la négociation de la clause de résiliation précédemment mentionnée. Le revendeur a-t-il la possibilité d’exiger du client le remboursement des frais de résiliation qui lui seront facturés par le fournisseur original? Le client aura-t-il accès à ses données ou à son compte auprès du fournisseur original si le revendeur se retrouve en défaut ou devient insolvable?

5. Limitation de responsabilité et dommages

Le client devra se pencher sur les limitations de responsabilité qui sont proposées par le fournisseur de services. Comme ces limitations excluent généralement tout autre type de garantie ou de représentation non prévu au contrat de service, le client devra s’assurer que le contrat contient bien toutes les garanties qui ont été négociées ou représentées lors de la présentation des services.

Les clauses de limitation de responsabilité viennent parfois limiter les sommes que le fournisseur de services peut être appelé à verser au client en cas de dommages. Ces sommes sont souvent établies par un calcul précis qui se base sur les mensualités payées par le client aux termes du contrat. Ce dernier doit donc s’assurer que le montant ultimement payable par le fournisseur de services pourra raisonnablement couvrir les dommages subis.

6. Centrées de données

Les opérations de centres de données ont connu une croissance fulgurante au cours des dernières années en raison de l’importance grandissante du traitement de données pour plusieurs secteurs d’activités. Nous vous invitons à prendre connaissance de certaines considérations essentielles avant de conclure un contrat de colocation en consultant notre article de bloG sur le sujet.

Par Audrey Robitaille