NOUVELLES EXIGENCES LORS DE TRANSFERTS IMMOBILIERS EN MATIÈRE DE NON-RÉSIDENCE

Les acquisitions immobilières par des non-résidents, tant au Québec que dans le reste du Canada et ailleurs dans le monde, n’est pas un phénomène nouveau. On assiste depuis plusieurs années à une augmentation accrue des transactions par des non-résidents canadiens, ce qui a eu pour effet d’augmenter de façon marquée la valeur du marché immobilier. Pour contrer ce phénomène, l’Ontario et la Colombie-Britannique ont légiféré sur le sujet, en imposant des taxes supplémentaires (15% pour l’Ontario et 20% pour la Colombie-Britannique) aux transferts immobiliers par des acheteurs étrangers dans certaines régions ciblées.

Bien que le Québec n’ait suivi ses homologues provinciaux, des mesures ont à tout le moins été mises en place permettant d’évaluer l’étendue des transactions immobilières réalisées au Québec. En effet, le 1er octobre 2020 est entré en vigueur le Règlement sur le formulaire de présentation de la réquisition d’inscription d’un transfert immobilier, lequel a apporté des changements au sujet des renseignements à indiquer lors de la publication d’actes de transferts au Registre foncier. Plus précisément, les réquisitions d’inscription présentées à partir du service en ligne de réquisition d’inscription (SLRI) doivent désormais comporter des déclarations relatives au statut de résidence des parties à ces transferts, que ces parties soient résidents ou non-résidents.

L’adoption de ce Règlement fait suite aux modifications effectuées à la Loi concernant les droits sur les mutations immobilières en juin 2018. Les nouvelles dispositions de cette Loi permettaient notamment au ministre de l’Énergie et des Ressources naturelles (MERN) d’obtenir des renseignements concernant la citoyenneté des cédants et des cessionnaires de transferts immobiliers et de les transmettre au ministère des Finances du Québec aux fins de l’élaboration par le ministre des Finances, des politiques en matière économique, fiscale, budgétaire et financière, conformément à l’article 2 de la Loi sur le ministère des Finances.

Voici quelques éléments importants de ce nouveau Règlement :

Renseignements exigés

L’article 2 du Règlement prévoit qu’en plus des renseignements visés à l’article 2982 du Code civil du Québec, les déclarations suivantes devront être faites, tant par les cédants que les cessionnaires, lors de transactions immobilières :

Dans le cas d’une personne physique :

  • sa citoyenneté
  • son statut de résident permanent, le cas échéant, au sens de la Loi sur l’immigration et la protection des réfugiés (L.C. 2001, c. 27)
  • l’intention du cessionnaire d’occuper ou qu’un membre de sa famille occupe un logement de l’immeuble à titre de résidence principale

Dans le cas d’une personne morale:

  • le nom de l’État, de la province ou du territoire où elle a été constituée
  • lorsqu’elle a complété au moins une année d’imposition, si elle résidait ou était réputée résider au Canada pour sa dernière année d’imposition terminée avant la date du document constatant le transfert

Dans le cas d’une fiducie ou d’une société de personnes:

  • le nom de l’État, de la province ou du territoire du lieu de la conclusion de l’acte établissant la fiducie ou formant la société
  • dans le cas d’une société en nom collectif, si au moins la moitié de ses membres sont des étrangers; dans le cas d’une société en commandite, si un commandité est un étranger
  • dans le cas d’une fiducie, lorsqu’elle a terminé au moins une année d’imposition, si elle résidait au Canada pour sa dernière année d’imposition terminée avant la date du document constatant le transfert

Il est à noter que la notion de « vente » inclue toute cession, vente à réméré, vente par le créancier, vente sous contrôle de justice et vente suite au défaut de paiement de l’impôt foncier.

Quelques exceptions prévues par la Loi

L’article 3 du Règlement prévoit quatre (4) exceptions à l’obligation de fournir les renseignements prévus à l’article 2. Ces exceptions ne s’appliquent toutefois qu’à un cédant agissant au nom du propriétaire dans le cadre de ses fonctions. Ces exceptions sont les suivantes :

  • pour celui qui agit en qualité de syndic ou de liquidateur d’une succession;
  • dans le cadre de l’exercice d’un droit hypothécaire;
  • dans le cadre de l’exécution forcée d’un jugement;
  • pour défaut de paiement de l’impôt foncier.

Afin de faciliter la préparation des réquisitions d’inscription et l’obtention des renseignements nécessaires, le MERN a mis à la disposition des professionnels du droit un formulaire de déclaration du cédant ou du cessionnaire, lequel contient toute l’information devant être inscrite au SLRI [1].

Il va sans dire que ce Règlement n’est pas sans impact pour les parties à un transfert immobilier et leurs conseillers juridiques. L’application des nouvelles dispositions de ce Règlement apporte une charge supplémentaire pour les professionnels du droit lors de la publication de ces transferts. Les exigences reliées à la publication d’actes de transfert pourraient potentiellement impliquer la hausse des frais juridiques puisqu’elle implique un travail additionnel de la part des juristes et des autres professionnels impliqués, non seulement lors du processus de publication, mais également dans la détermination du statut de résidence d’une personne morale, lequel n’est pas toujours évident.

Par Marie-Chantale Dubé


[1] http://www.finances.gouv.qc.ca/fr/Ministere10.asp