Les clauses de paiement des honoraires extrajudiciaires dans les contrats commerciaux

Le 6 avril 2021, dans l’affaire Banque de Nouvelle-Écosse c. Davidovit, la Cour d’appel du Québec a confirmé la validité de la clause de paiement des honoraires extrajudiciaires prévue dans un contrat de prêt long terme et dans un contrat de cautionnement. Cette clause, omniprésente dans les contrats de prêt, prévoit que le débiteur et/ou la caution demeurent responsables des frais juridiques encourus par le créancier pour recouvrer auprès du débiteur les sommes dues. 

La Cour d’appel, sous la plume du juge Schrager, renverse le jugement de première instance et fonde sa décision sur les points suivants : 1) une clause d’obligation unilatérale, par laquelle une partie s’oblige unilatéralement envers une autre, n’est pas nécessairement abusive; 2) le Code civil du Québec permet ce type de clause, notamment celle prévoyant l’octroi de dommages et intérêts additionnels lorsque prévus contractuellement par les parties et, bien qu’en obiter 3) un formulaire pré-imprimé, préparé par le créancier, n’est pas automatiquement qualifié d’un contrat d’adhésion.

1) Caractère abusif d’une clause

Le juge Schrager confirme qu’une clause prévoyant le paiement des honoraires extrajudiciaires du créancier par le débiteur n’est pas en soi abusive, même si cette dernière est incluse dans un contrat d’adhésion. La Cour rappelle que « le simple fait qu’une partie à un contrat se trouve désavantagée n’est pas en soi une raison pour conclure que la clause en question est abusive » (traduction libre). En effet, admettre le contraire serait enlever tout effet juridique à la clause de paiement des honoraires et à tout cautionnement parce qu’il crée, par sa nature, des obligations unilatérales de la caution en faveur du créancier.

2) Article 1617 al. 3 C.c.Q.

Par la suite, la Cour affirme que les clauses de remboursement des honoraires extrajudiciaires peuvent trouver leur source dans les dispositions du Code civil du Québec[1], notamment l’article 1617 al. 3, lequel permet spécifiquement la stipulation contractuelle par laquelle le créancier aura droit à des dommages-intérêts additionnels, si ces derniers sont justifiés. La Cour spécifie de plus que ce type de clause, basée sur cet article, est valide tant dans les contrats de grés à gré que dans les contrats d’adhésion.

3) Contrat d’adhésion

Bien qu’en obiter puisque cette partie du jugement de première instance ne faisait pas parti des motifs d’appel, le juge Schrager affirme son désaccord quant à la qualification du contrat par le juge de première instance. En effet, bien que le contrat de prêt à terme et le cautionnement ont été préparés par le créancier à l’aide des formulaires préimprimés de ce dernier, cela ne signifie pas pour autant que le contrat en est un d’adhésion. La Cour souligne que plusieurs éléments sont à considérer pour qualifier le contrat. En effet, la possibilité de choisir, à l’aide de cases à cocher, certains aspects du formulaire, peut démontrer une possibilité de négocier les conditions et donc permettre de qualifier le contrat de gré à gré. 

Conclusion

Bien que la Cour confirme la validité de cette clause tant dans des contrats d’adhésion que de gré à gré, elle confirme également qu’elles sont balisées par le principe de la bonne foi. Le juge Schrager rédige à ce titre: “je pense qu’en 2021, il convient de déclarer, en principe, que les clauses de remboursement des honoraires, même incluses dans les contrats d’adhésion, ne sont pas nécessairement abusives (et donc invalides), mais que leur application est soumise au contrôle des tribunaux afin que le droit de réclamer des honoraires soit exercé de manière raisonnable et selon le principe de la bonne foi » (traduction libre). Dans cette affaire, la Cour a réduit la réclamation de la banque de 31 000$ à 12 000$.

Par Catherine Demers


[1] Art. 1617 al. 3